Préface
Pour amorcer ma présentation et briser la glace entre nous, sachez que je suis reconnu travailleur handicapé, une appellation assez réducteur qui l'est encore davantage à travers son sigle : RQTH. Ce titre efface trop souvent le potentiel de la personne en situation de handicap. Sans doute est-ce pour ceci que ma structure se nomme PROVENTIEL afin de refléter mes réelles capacités et mes compétences dans de multiples domaines, sorte de tremplin pour ma créativité et mon audace.
Dès l'adolescence, j'ai été sensibilisé par le handicap compte tenu de mon défaut d'élocution couplé à un bégaiement - aujourd'hui en forte diminution. À l'âge de six ans, une opération du voile du palais (trop court) m'a permis enfin d'articuler des sons. S'ensuit la valse des orthophonistes pendant plusieurs années, en même temps que les brimades au collège deviennent légions face à mes difficultés de prononciation.
Inutile de revenir sur mes opérations suivantes, généralement dues à d'autres malformations, bien avant ma majorité ! Cette avalanche d'interventions chirurgicales et de spécialistes en tous genre ont façonné ma personnalité et mon parcours autant professionnel que social.
Mon parcours
Malgré une scolarité ordinaire en Basse-Normandie, j'ai rapidement éprouvé des difficultés d'apprentissage, sans doute lié à mon trouble du langage parlé et d'un isolement récurrent. Seulement l'orthographe et le rédactionnel m'amenaient à éviter l'échec scolaire et m'aidaient à m'améliorer dans la perception du monde. Ce n'est qu'une fois adulte que je mis un nom à ce désordre intérieur et à ces sentiments d'exclusion : la dysphasie de la famille des DYS.
Mon premier emploi s'est déroulé en contrat d'alternance en région parisienne, dans une grande société française spécialisée dans l'informatique. Deux années à suivre une formation pour devenir Secrétaire de direction, métier très peu ouvert aux hommes à cette époque, mais c'était le seul qui correspondait à mon parcours administratif. De même c'était l'unique moyen de poser un premier pas dans le monde professionnel et d'acquérir le statut RQTH, dont j'ignorais toute la symbolique alors. En parallèle, je développais mes envies créatives et rédactionnelles. Cette formation m'a aussi permis d'appréhender l'avènement d'Internet, encore à ses balbutiements en France. En 1999, une étude de cas pour la conception d'un site fictif d'un hôtel, face à un jury professionnel, m'a mis rapidement le pied à l'étrier et a fait naître en moi la passion du web. Dès l'obtention de mon diplôme de BTS, je me suis lancé dans cette nouvelle aventure : à l'aube du IIIè millénaire, ce nouveau secteur accueillait facilement des arrivants de tous horizons et sans bagage spécifique.
Cette facilité d'adaptation et d'ouverture séduisaient dès l'entretien d'embauche, avec la clé de belles promesses. Mais je déchantai vite. Une expérience dans une mission locale à Paris annonçait les premières désillusions : le décalage entre l'engagement fait en entretien et les missions confiées au quotidien, aux côtés des conseillers emploi ou à l'accueil, était renforcé par un manque de considération à mon égard, par des conflits internes et par une volonté de me pousser vers la sortie, car titulaire d'une RQTH j'étais susceptible d'aller aux Prud'hommes. La fin de ma période d'essai mettait un terme définitif à mon contrat supposé CDI.
J'ai enchaîné avec un autre CDI, dans une start-up. Une formation interne était prévue, dans les locaux parisiens, en échange d'aides versées par l'Agefiph aux dirigeants. Euphémisme qui s'est soldé, un an plus tard, par un licenciement pour cause économique en même temps que deux autres employés (tous sous le statut TH) en août 2000. Ceci un mois avant l'annonce fracassante d'une levée de fonds « miraculeuse » !
Premier mois de chômage qui allait durer trois longues années. À cause des promesses non tenues en terme de formation, mes compétences techniques ont peu évoluées et mes dernières expériences professionnelles étaient insuffisantes pour prétendre à un poste de développeur web. Toutes mes recherches en ce sens ont échouées, m'obligeant à devenir simple Opérateur de saisie en intérim, malgré un passage éclair de trois mois dans une autre start-up. L'envie de développer mes propres projets dans un environnement plus éthique commençait alors à s'épanouir en moi.
Ma rencontre avec Alain Baden en octobre 2001, en région parisienne, a été déterminante pour la suite d'une carrière en dents de scie. Octobre 2003 vit mon retour à l'emploi, certes un boulot alimentaire très éloigné de mes aptitudes réelles, cependant c'était suffisant pour me permettre de travailler sur mon projet lié à l'emploi et au handicap : Handi-cv.com. Trois années ont passé avant de saisir une nouvelle opportunité suite à la signature d'une convention de partenariat commercial avec une société d'intérim... C'était le déclencheur me permettant de créer mon propre emploi sur-mesure.
Début 2011, je fais mes premiers pas dans le Réseau des Réussites, l'action bénévole et volet emploi de l'association LADAPT, dont une antenne venait de s'ouvrir à La Rochelle où je résidais depuis 2008. Loin d'avoir les épaules solides pour être parrain, essentiellement à cause d'un cataclysme dans ma vie personnelle ayant impacté lourdement ma vie professionnelle, quelques mois plus tôt, je ne me sentais pas en mesure d'aider les autres avant de pouvoir m'aider moi-même. Passionné de photographie et de belles images, je me suis investi dans le comité local en tant que rédacteur web, la communication extérieure et dans la réalisation de reportages photos.
Le décès soudain de mon associé Alain Baden, en mai 2015, m'a contraint à me remettre en cause et à concevoir un nouveau projet entrepreneurial, sans aide extérieure.
En février-mars 2018, je participe à un atelier d'écriture organisé par l'Agefiph. Avec 9 autres volontaires, lors de deux séances d'écriture, j'ai rédigé un texte littéraire sur le thème de l'emploi et du handicap. Cet atelier d'écriture avait pour finalité d'illustrer nos engagements et notre vision très personnelle sur le quotidien et la vie des personnes handicapées et des entreprises. Le texte a été publié dans le rapport d'activité 2017 de l'Agefiph. Mon histoire ? « Une journée peu ordinaire ».
Ces différentes épreuves et circonstances imprévisibles ont fait de moi un entrepreneur TIH sans l'avoir réellement désiré à l'origine... Je le suis devenu par défaut, au fil du temps et à force de concevoir de nouveaux projets. Cette prise de conscience sur le tard m'a éloigné des conseils et du soutien financier de la part de l'Agefiph, ainsi que d'autres structures spécialisées dans l'accompagnement des entrepreneurs handicapés.
Autodidacte, je cherche souvent à me détacher des connaissances formatées et basiques pour forger ma propre opinion et ma capacité à raisonner autrement, bien qu'il soit utile par moments de me conformer à un cadre connu pour m'abstenir de devenir marginal.
En décembre 2019, je quitte définitivement La Rochelle pour m'installer à Avignon, aux portes de la Provence. Un mois après, je rejoins l'équipe de Talents Handicap, à Cagnes-sur-Mer (06), afin de mieux promouvoir et favoriser le recrutement des personnes handicapées. Aussi je poursuis le développement et l'animation de mon site phare Handi-cv.com, après leur avoir vendu. Ma collaboration avec eux s'est terminée en juillet 2021.
J'ai vite enchaîné avec de nouveaux projets plus personnels, toujours dans le numérique lié au handicap, ainsi que dans mon implication dans le Réseau des Réussites de LADAPT Vaucluse. Tout cela en étant à la recherche d'un emploi salarié.
Fin mars 2023, après des tests de logique et des entretiens en visio, j'intègre l'école Matrice, centre de formation et de reconversion aux métiers du numérique, pour une formation intensive en développement full-stack. Nouvellement implantée à Avignon, elle est en partenariat avec La French Tech Grande Provence qui rassemble startups et entreprises, acteurs de l'accompagnement et l'écosystème de l'innovation à Avignon.
Cette formation s'est achevée fin juillet. Avec la nouvelle politique de Pôle emploi qui doit se transformer en France Travail, les subventions sont gelées et l'école Matrice ferme rapidement ses portes. L'école Nextech accepte de reprendre tous les apprenants pour une année d'alternance à partir de septembre 2023. Je commence à suivre la première semaine de formation sur le campus d'Agroparc ; je me rends compte que je ne suis pas à ma place et que je souhaite évoluer ailleurs. Bien vite, je décide à entamer des démarches pour une reconversion professionnelle. Une journée Portes Ouvertes à l'AFPA me fait connaître plusieurs métiers, dont celui d'Assistant Ressources Humaines.
Épilogue (ou dénouement)
Mon souhait à long terme est d'élargir mes activités professionnelles et extra-professionnelles pour éviter de m'enfermer dans une unique idéologie ou dans un seul domaine de compétences ! Une fantaisie peu commune dans une époque où l'étiquette est reine.